Pensées littéraires – Nathacha Appanah
Tropique de la violence, Nathacha Appanah
(Paris, Gallimard, 2016, 174 pages)
Ayant reçu la même année de la publication le prix Femina des lycéens et le prix France télévisions en 2017, le roman de Nathacha Appanah, Tropique de la violence, évoque la problématique de la liberté et de ses limites fragiles. Après avoir lu ce livre, il ne nous reste plus qu’à répondre à la question de Mo : Est-ce qu’on a une odeur particulière quand on devient un assassin ?
Voici l’île française de Mayotte, nichée dans le Canal de Mozambique où la nature se manifeste dans sa grandeur sauvage : on voit de lagons avec des tortues géantes, une mer qui s’étend jusqu’à l’horizon, des massifs coralliens et des âmes livrées à elles-mêmes. L’ouvrage de Nathacha Appanah est, donc, une polyphonie narrative. Les consciences des vivants et des morts s’entremêlent – on écoute les témoignages de ceux qui ne pouvaient pas échapper à leur sang, à leur destin et à l’île, ni même au-delà de la vie. On est tous touristes sur une terre d’asile pour les réfugiés Malgaches, Comoriens et Anjouanais, ces multiples voix nous racontant la triste histoire de Marie et de son fils à l’œil vert, Moise.
Après la mort de sa mère adoptive, Mo, révolté de l’éducation de blanc qu’il a reçue, un Français sur une terre sauvage, cherche les origines les plus basses de son être. Ainsi, découvert-il la misère, l’injustice, la violence et le crime, tout cela lorsqu’il fait la connaissance de Bruce, le roi de Gaza. Où les lois tremblent, Mo doit apprendre à obéir à celui qui détient le pouvoir.
Dans la misère, l’homme devient chair et sensations. On est des animaux, on se bat, on tue, on est dévoré par la violence qui pulse dans notre sang. La vraie vie est un immense camp de clandestins à ciel ouvert. Étrangeté… On reste seuls, vulnérables, on cherche un asile dans la beauté incandescente de l’île : Je fends l’océan de mon corps souple, mon corps vivant, et je ne remonte pas.